Bien qu’il soit utilisé des millions de fois pour lubrifier des processus chimiques, on ne comprend pas toujours exactement ce qui se passe lorsque le catalyseur rend quelque chose possible sans qu’il soit usagé. Par exemple, de nombreux catalyseurs industriels, utilisés avec beaucoup de succès depuis près de cinquante ans, contiennent des centres métalliques isolés à la surface des supports d’oxyde. Pourtant, la structure et l’action de leurs centres catalytiques ne sont toujours pas claires aujourd’hui. Grâce en partie à la thèse de doctorat de Murielle Delley à l’EPF de Zurich, cela commence à changer, et c’est la raison pour laquelle elle reçoit le Prix Schläfli.
De fait, le lien avec la réalité quotidienne n’est certes plus aussi évident, mais il est bel et bien présent, et on pourrait même dire: plus que jamais. Le procédé étudié par Murielle Delley est d’une importance cruciale dans la production du polyéthylène, communément appelé PE. C’est de loin le plastique le plus utilisé dans le monde. Nous le connaissons grâce aux films alimentaires, aux sacs de courses en plastique, aux revêtements de briques de lait, aux bouteilles en plastique pour les produits de nettoyage, etc.
Pour mieux comprendre ce procédé, il faut également le rendre plus efficace, plus propre et plus écoénergétique. Toujours est-il qu’une meilleure compréhension des principes fondamentaux chimico-physiques ouvre une foule de possibilités en termes d’application, affirme Murielle Delley. Cela vous ennuie-t-il parfois que la chimie d’aujourd’hui soit surtout associée aux problèmes environnementaux, que le plastique soit associé à la pollution des mers? Bien sûr, Murielle Delley estime que «la chimie devrait bénéficier d’une meilleure image». Pourtant, on ne parle malheureusement que des aspects négatifs de l’industrie chimique. Elle est convaincue qu’il s’agit là également d’un défi en matière de communication pour les chercheurs.
Elle-même ne peut s’imaginer faire autre chose que de la recherche. Elle nous confie par la suite quelque chose qui peut sembler horrible au reste de la population: «Faire de la recherche, c’est pouvoir aller à l’école pour le reste de sa vie». Pour Murielle Delley, cet apprentissage tout au long de la vie ne s’apparente pas à un devoir ennuyeux, c’est un privilège. Essayer toujours de mieux comprendre comment sont les choses et pourquoi elles sont telles qu’elles sont. Elle sait que la science ne peut donc jamais connaître de fin, que la recherche est un processus: une description de la réalité qui, à son tour, devient une source d’inspiration pour d’autres questions, d’autres recherches. Même les esprits brillants n’arrêtent jamais d’apprendre.